Un essai détaillé
Crise de la quarantaine
Boxer de 1.300 cm3, 145 ch et 149 Nm, suspensions EVO Telelever et Paralever, 237 kg en ordre de marche, 20.690 euros
La BMW R1300 GS fait sa crise de la quarantaine. Sans divorce, mais en demi-rupture avec sa devancière. Une étape qui signe une nouvelle esthétique, une perte de poids, une attention au style, à l’élégance avec toujours plus de performances et de technologies optionnelles. Bref, la GS nous ressemble toujours plus…
Motards, que faisiez-vous en l’an de grâce 1980 ? C’est en effet l’année de naissance d’une légende, une référence, une machine devenue presque mètre étalon d’un segment désormais incontournable, essentiel même pour l’industrie motocycliste : le trail. La huitième décennie du vingtième siècle voit l’arrivée de la première BMW G/S, la R80. Lequel d’entre-vous aurait pu alors croire au succès planétaire et toujours croissant de ce modèle semblant échappé d’un terrain d’enduro ? Car c’est bien de là qu’une partie de ses gènes proviennent. Et qui se souvient qu’elle est aussi la machine qui a sauvé la division motorrad de la faillite ?
En effet, malgré la sortie de la routière BMW R série 5 en 1969, la partie moto de la Bayerische Motoren Werke est à la peine au milieu des années 70 sur lesquelles règnent les productions japonaises aux multiples nouveautés. Comment sauver BMW Motorrad des légions nipponnes ?
Parallèlement, la firme bavaroise cumule les succès en compétition offroad. C’est principalement l’enduriste Herbert Scheck (10 titres de champion d’Allemagne et 22 participations aux ISDT) et Lazlo Peres, directeur des essais, qui, au sein du département compétition, aideront à concevoir une machine différente. Ainsi en 1971, Scheck fait perdre 40 kg à sa lourde R75/5 d’enduro en n’hésitant pas, entre autres, à percer le moindre boulon. Leur expertise sur ces engins dédiés aux compétitions d'enduro fait gagner BMW.
Le constructeur a l’intuition que sur le marché privé seule une moto polyvalente pourrait générer suffisamment de volume de ventes pour relancer la marque. La future G/S se prépare au travers d’un prototype nommé en interne « Red Devil ». Elle repose sur un boxer twin de 798 cm3 (84,8 x 70,6mm) produisant 50 ch à 6 500 tr/mn intégrant les dernières innovations techniques apportées par les ingénieurs munichois comme des chemises de cylindres traitées au Nikasil. Et le frein avant arbore même un disque. En 1980, la R80 G/S de série est proposée à la presse qui tombe sous le charme de cette machine si facile à emmener sur et hors route (Gelände / Strasse) malgré ses 185 kilos. En un an, 6 631 exemplaires sont écoulés. Le défi est remporté ; la légende va désormais s’écrire sur les tableaux de vente réchauffés au soleil des Rallyes Africains (1981-83-84 et 1985).
La GS, c’est aussi une constante évolution technique. Après la R100 et leur système Paralever viendront les nouveaux Boxer de 1100 puis 1150 cm3 et les fourches à Telelever. Les évolutions 1200 air/huile double arbre à cames mèneront au premier flat refroidi par liquide et aux suspensions électroniques. Les versions R 1250 GS s’équiperont de la distribution variable Shiftcam. Après quarante-trois ans et plus d’un million de GS écoulées, BMW révolutionne à nouveau son égérie. La R1300 GS renouvelle en effet intégralement le trail allemand, tant en style qu’en moteur, châssis et technologie. Une crise de la quarantaine pour mieux préparer l’avenir. C’est aux environs de Malaga que nous découvrons la star du segment, pour un périple routier de 365 km et une sortie offroad d’une demi-journée avec passage par l’EnduroPark.
Découverte
Qui dit crise de la quarantaine dit souvent rupture et remise en question. Sans aucun doute, la nouveauté avoue des changements profonds et semble se tourner vers ses origines d’enduriste. Dans l’esprit bien sûr. Dénominateur commun : l'allègement général de la machine, tant en poids (12 kg !) que visuellement. Elle évoque, toute proportion gardée, la sensationnelle HP2 Enduro. Notez la finesse de son habillage, ses volumes suivant désormais au plus près la structure du Trail allemand. Son nouveau style fait penser, pour les versions les plus simples, à une méga-enduro. Sous sa courte bulle basculante (électrique optionnelle), l’optique assure une toute nouvelle signature lumineuse ; Circulaire, le projecteur central à leds matricielle assure feux de position, croisement, route et, en option Pro, d’éclairage sur l’angle. Avec la fonction d'éclairage de virage adaptatif, l'horizon de la lumière reste relativement constant et s'adapte à l'angle d'inclinaison. L’inédite croix loge seulement les feux à fonction diurne. Pourquoi une croix ? Pour signifier un X, comme « cross » soir un rappel de la polyvalence Gelände-Strasse version lumineuse.
Les clignotants peuvent être logés dans les pare main ou placés classiquement auteurs du feu avant suivant les déclinaisons, notamment sur la Trophy plus dévolue à l’offroad. Sportif, profilé, le dessin affiné du bec et des écopes se fait fluide, courant vers un réservoir aluminium de 19 litres aux lignes compactes. La 1300 GS peut être dépouillée à l'extrême ou, au contraire, recevoir tous les équipements de confort faisant d'elle la performante routière que l'on connaît (dont une bulle électrique). Habituellement conçu selon un plan purement fonctionnel, le design démontre enfin un souci d’intégration optimale des composants.
Pour ce faire, l’ensemble du châssis est en vraie rupture de style et de conception. Les assises reposent sur une nouvelle boucle arrière formée d’une monocoque en fonte d’aluminium. Cet élément permet le passage plus simples et discret de câbles pour les supports de bagagerie électrifiés ; De même la modularité est supérieure afin de proposer différentes fonctions.
La partie frontale est désormais composée d'une structure aux sections rectangulaires, soudées sur une partie centrale. Celle-ci est formée de deux solides platines latérales en boomerang, facettés et particulièrement esthétique avec leur surface en méplats profilés. Selon les ingénieurs, la rigidité est largement supérieure au châssis précédent.
L’ensemble vient s’appuyer sur le moteur à fonction porteuse, l’incontournable boxer. Celui-ci cube désormais 1 300 cm3 (106,5 mm x 73 mm) par réduction de sa course et augmentation de l’alésage. Ses deux arbres à cames en tête disposent d’un dispositif d'équilibrage et du calage variable d'admission ShiftCam. La volonté de compacité a guidé les ingénieurs. En effet, le bloc devenait trop imposant. La réduction de la course réduit la largeur des cylindres, la chaine de distribution côté droit est désormais placée à l'avant, limitant ainsi le décalage horizontal entre les deux cylindres. De même, la boîte est désormais logée sous le moteur, réduisant les forces portées sur son arbre primaire, plus court et contra-rotatif au vilebrequin. Le tout permet d’alléger le flat de 3,9 kg et l'ensemble propulseur de 2,1 unités. Impressionnant, comme ses performances : 145 chevaux à 7 750 tours et 149 Nm de couple à 6 500 révolutions. Le régime maximal est même fixé à 9 000 rotations minute. Et entre 3 600 et 7 800 tours, le couple ne descend pas sous les 130 Nm ! De quoi assurer à un agrément de chaque instant. Ces valeurs sont aussi à mettre au crédit de taux de compression en nette hausse : 13.3:1 (avant 12.5:1) et de diamètres de soupapes plus grands : 44 au lieu de 40 mm pour l’admission et 35,6 au lieu de 34 mm à l’échappement.
Pour contrôler la nouvelle artillerie allemande, un vaste ensemble électronique est convié. On retrouve bien sûr une centrale inertielle (IMU) à trois axes (6 directions) pour gérer à tout moment vos évolutions et les assistances (anti-patinage, ABS, frein moteur. etc). Désormais, quatre modes de pilotage (Road, Rain, Enduro et Eco) vous donnent les meilleures pré-réglages de la machine. Le contrôle de couple moteur (MSR) est de série et désactivé en mode Enduro Pro. Et pour chaque profil, chaque aide est ajustable selon vos préférences (en mode Pro optionnel bien sur).
La R1300 GS est également dotée de clignotants à arrêt automatique, d’un régulateur de vitesse et de l’assistance au démarrage en côte (Hill Start). Le régulateur adaptatif est optionnel sur ce modèle. La machine freine et repart automatiquement et un détecteur d’angle mort fait s’allumer des témoins aux rétroviseurs pour signaler la présence d’un véhicule. Et BMW propose aussi l’avertisseur de changement de file (SWW) avec le même système lumineux et l’alerte de collision frontale (FCW). Oui, une vraie bagnole.
L’innovation se poursuit en termes de partie cycle, notamment au niveau de la direction Telelever. En effet, avec des longueurs de tubes importantes se produit une certaine inclinaison de l’ensemble au niveau du haut de la fourche et de son té supérieur. On parle ici d’ingénierie fine, donc de variations subtiles. La rigidité des éléments supérieurs était moindre que sur les machines sportives à Telelever plus basse (R1200 S par exemple) et le ressenti de l’avant paraissait plus diffus. Désormais, la platine des pontets supportant le guidon est montée de façon très rigide sur la colonne de direction.
Entre cette platine et le té supérieur fixé au sommet des tubes, une pièce de métal en arc légèrement flexible vient jouer le tampon pour contrer le phénomène d’inclinaison au niveau du té supérieur. Le système réduit ainsi les forces générées au freinage ou à l'accélération sur la fourche pour en limiter son inclinaison au sommet. Dans le té de fourche inférieur, l'ajout d'un roulement à rouleaux supplémentaire garantit également une plus grande précision. Le diamètre de son axe passe à 25 mm (+ 5), augmentant ainsi encore la rigidité des éléments au niveau de la colonne. L’ensemble de ce système devrait enfin réduire la faiblesse de sensation et retour d'informations au guidon, souvent reproché au Telelever.
Avec tant d’évolutions, la géométrie avoue des cotes sensiblement différentes de celles de sa devancière. La 1300 GS dispose d’un angle de colonne de 26,2° (25,7°), une chasse de 112 mm (100,6) pour un empattement de 1 518 unités (1 514). C’est donc, en théorie, une moto plus stable, légèrement plus posée et facile en tout terrain. En standard, la fourche coulisse sur 190 mm, l’amortisseur fait débattre le monobras logeant la transmission acatène sur 200 unités. Le tout sur des combinés amortisseurs purement mécaniques. Ensuite vient l’éventail des possibles électroniques. L’option châssis Sport donne 20 mm de course en plus à ces éléments. Une belle idée pour 335 €… à rajouter au pack Dynamique « offrant » le DSA pour 1 790 €.
Cet acronyme pour Dynamic Suspension Adjustment est la discrète innovation principale qui désormais, en plus de la gestion de la précharge et, en continu, de l’hydraulique propose un contrôle de la raideur du ressort. Une valeur fixe qui limitait toujours l’amplitude d’efficacité en réglage extrême type confort ou Enduro où l’hydraulique plus lâche mettait à mal la spire. Au côté du combiné amortisseur géré par électronique, un nouvel élément déporté type piggy back loge désormais un piston comprimant, si besoin, un double ressort concentrique. L’huile de l’amortisseur principale sous pression dynamique est envoyée soit dans un réservoir pressurisé habituel, soit, si les valeurs souhaitées l’exigent, dans cette bombonne, ajoutant l’effet de raideur supplémentaire recherché… un joli tour d’ingénierie. Pourtant, BMW ne communique guère sur cette technologie. Enfin, en option bis repetita, le Véhicule Height Control (VHC) place en position basse (- 30 mm en moins de 3 secondes) la moto afin de la rendre plus accessible. Au-delà de 50 km/h, les puces auront refait monter la machine.
De série, la R1300 GS reçoit des jantes de 19 et 17 pouces à cinq branches dédoublées en fonte d’aluminium. En option, on ne résistera pas aux inédites jantes forgées Enduro capables de suivre vos pérégrinations les plus engagées hors route. Et des éléments à rayons tangentiels complètent l’offre. Par défaut, la GS chausse des Metzeler Tourance Next en 120/70 et 170/60. Pour gérer votre allure, leur rotation est soumise à la force d’étriers de frein radiaux Brembo à 4 pistons mordant des doubles disques semi-flottants de 310 mm sur le train directeur. La pince arrière à double piston serre un monodisque de 285 mm.
La BMW R1300 GS réduit son poids de 12 kilos, soit un total en ordre de marche de 237 unités. Elle séduit par ses finitions et l’ajustement de ses nouveaux composants, son style intégré plus cohérent. Mais la béquille centrale est devenue… optionnelle. Notez son nouvel ergot articulé permettant de l’escamoter afin de n’en point gêner votre talon gauche. Une très bonne idée et une jolie pièce. Enfin, avec les options de suspensions, la mise en place sur cette centrale est assistée ! La suspension fait descendre la roue arrière pour faciliter ensuite la bascule. Trop n’est jamais assez.
Au bureau des complaintes, les pare-mains sont peu couvrants et semblent trop souples, obligeant à piocher dans les options pour de meilleurs éléments. Même constat pour la platine de poignées passager longues avec porte-paquet. Son profil évidé est désagréable, sa structure souple. La version compacte est bien plus qualitative.
Question entretien, les révisions ont lieux tous les 10 000 km et la garantie est de (seulement) 3 ans.
En selle
Lors d’une rupture, on perd parfois des choses importantes. La nouvelle R1300 GS son système de réglage de selle à platine réversible qui permettait facilement de passer de 850 à 870 mm. En standard, cette première valeur est fixe. Il faudra ensuite choisir une assise optionnelle haute ou basse et/ou passer par le nouveau système de suspensions électroniques. Pour les plus d’un mètre quatre-vingt, c’est un peu juste en termes de flexions de jambes. On appréciera la selle haute de la version Trophy ! Sachez que, oui, des options, vous assurent de 800 à 890 mm d’altitude disponible. Enfin, bonne nouvelle, le meilleur alignement des cylindres évite de s’y taper les tibias.
Sur notre version routière « optionnées », le recul est juste correct, la selle passager confort dépassant en hauteur celle du pilote. Les assises plates de la Trophy sont bien plus agréables et leur mousse largement suffisante en termes de confort. Dommage, aucune n’assure une bascule légère du pilote vers le large cintre. La face inclinée du réservoir reçoit un revêtement caoutchouté protecteur fort valorisant et ménage beaucoup de place devant le pilote. Profilé, il écarte également moins les jambes. On retrouve l’ergonomie habituelle au GS sur les commodos. Mais deux nouveaux bouton côté gauche apparaissent. L’un sert de raccourcis pour les fonctions les plus utiles ; son icône type burger lui donne son nom. À ses côtés un basculeur « haut-bas » ou « plus-moins » complète ses possibilités. On peut alors choisir un paramètre, comme régler la bulle ou le DTC. Problème, si vous choisissez ce dernier et voulez ensuite ajuster votre bulle électrique… ledit basculeur n’aura pas cette fonction… mais modifiera le DTC. Un peu abscons.
À l’écran TFT de 6,5 pouces échoit toujours la responsabilité d’afficher les informations pléthoriques que propose la GS. Il ne se montre guère plus didactique à ce niveau, obligeant à rentrer dans force sous-menus pour ajuster le trail en suspensions, options de mode, etc. Un affichage Sport, comme sur les S1000 R regroupe niveau de DTC, de freinage et surtout le niveau de prise d’angle gauche et droit… Sachez que j’ai atteint 50 et 52°. Oui, ça sert surtout à en parler aux copains.
Une prise de courant de 12 volts est installée sur le côté droit du cockpit, un contacteur USB-A avec alimentation 5 volts se trouve dans le compartiment de chargement rabattable pour smartphone devant le guidon. Avec 2 400 mA, il permet une charge rapide de votre périphérique.
En ville
BMW a fort opportunément réduit les décibels outranciers de son flat. La mise en route ne fait plus craquer l’échappement compact comme sur les bruyantes 1250. Plus contenues, les pulsations du twin accompagne les évolutions toujours aussi équilibrées de la GS. Le velouté du moteur est des plus appréciables, mais déjà, une légère différence se fait jour. Cette mécanique se fait plus vive encore, réduisant tout effet d’inertie. Plus légère, la R1300 donne un agrément encore meilleur en espaces réduits. Son excellent rayon de braquage contribue également à sa facilité de prise en mains en zone urbaine. Enfin, les rétroviseurs renvoient un large champ, net à toute allure et s’ajuste correctement. Disponible, le flat accepte sans mal d’évoluer en 4 à 50 km/h. Seule la sélection au shifter montre une certaine rugosité. À bord tout est évidence et l’on ne songe qu’à une chose, partir au loin.
Autoroutes et voies rapides
Cette capacité toujours supérieure à prendre des tours se vérifie encore quand la GS pointe son bec vers l’horizon libre. Plus encore qu’auparavant, le flat témoigne d’une explosivité feutrée. Son nouveau rapport alésage course le rend légèrement plus sportif. On atteint vite les 200 km/h dans un excellent confort. Les déflecteurs additionnels autour de la bulle électrique en position haute soignent d’autant plus la déflexion. Au légal autoroutier, le twin fend l’air à un peu plus de 4 000 tours, sans vibration. Fort convaincant, le confort de selle assure de longues étapes sans peiner. On en profite pour tester le radar du régulateur de vitesse ACC. Ce dernier fait freiner sensiblement la machine quand le véhicule vous précédant se fait trop proche. Une alerte lumineuse et/ou haptique peut être choisie. Enfin, des témoins lumineux dans les miroirs des rétroviseurs vous avertissent de la proximité d’un véhicule derrière vous. En zone urbaine, c’est également efficace. Mais tout cela ne remplacera jamais votre vigilance. Et pour ne pas l’endormir, quittons donc le rectiligne pour des aventures plus tourmentées.
Départementales
La nouvelle BMW R1300 GS s’exprime pleinement sur le réseau secondaire ou sa précision fait merveille. La rigidité supplémentaire semble se ressentir principalement au niveau de la direction. Le nouveau système au niveau du guidon apporte une sensation d’un contrôle plus direct du train avant. Mais pas de quoi réellement donner un toucher de route totalement franc. Sur route, on apprécie surtout l’efficacité de l’ensemble châssis/partie-cycle. Neutre, naturelle, la GS s’emmène avec évidence. Intuitif, le trail allemand se pilote au regard et du bout des gants, plongeant dans les virages sans effort. L’effet de balancier du flat twin reste une qualité essentielle de la star des trail et le pneu arrière en 170 renforce son agilité. Réactive aux appuis repose-pieds et guidon, la machine passe d'un angle à l'autre sans inertie, emmenée par une mécanique savoureuse. En pilotage dynamique dans les courbes serrées, on maintient le flat entre 3 et 8.500 tours sur les intermédiaires, voire en deux dans les épingles. Cette remarquable disponibilité optimise nettement la dynamique de la BMW. On s’extrait ainsi avec force des virages sur des relances soutenues et dopées par une bonne allonge. La polka rapide de la Bavaroise s’accompagne plus nettement du grondement de sa boite à air. Moins sonore en échappement, la GS retrouve ainsi une voix moteur plus perceptible. Efficace, sa mécanique peut se faire sauvage quand on vient tordre la poignée droite.
Toutefois, la personnalité du bicylindre à plat semble un peu différente. Plus vif, il laisse moins transparaitre ce gras moteur qu’on lui connaissait. Mais, plein à tous les étages grâce à sa distribution variable Shiftcam, la mécanique est d’une présence rare quel que soit le rapport engagé. On est moins convaincu par le quickshifter dont l’action reste trop régulièrement sèche voire parfois rugueuse. Il faut bien appuyer la botte sur la pédale pour empiler rapidement les vitesses.
Les décélérations révèlent un autre atout de l’Allemande, l’absence de transfert de masse. Avec son Telelever, la GS freine toujours à plat, garantissant un parfait contrôle de la machine et un confort appréciable pour le passager, non soumis à la plongée de la fourche. Puissance et modulations sont également de mise et la BMW bénéficie aussi d’un freinage couplé (avant/arrière) optimisant son freinage. On entre alors naturellement sur les freins sans raidir la direction, bénéficiant aussi de l’allégement de la nouveauté. Suivant le mode de pilotage activé et sur les plus solides décélérations, la 1300 peut parfois bouger un peu sur ses suspensions pilotées. Un réglage plus approfondi, notamment en libérant un peu l’hydraulique, assure ensuite plus de sérénité. D’une grande précision, le trail se place sur sa trajectoire, plonge en virage et se cale sur sa ligne. On corrige facilement son évolution si besoin et l’on garde, sans à-coups, un filet de gaz sur l’angle. Parfaitement maîtrisée, l’injection pilote le flat et la roue arrière en pure symbiose et sous contrôle global de l’électronique. Avec 149 Nm de couple maximal et 85% de cette valeur disponible quasi à tout moment, les excellents Metzeler sont soumis à rude épreuve. Heureusement, les puces jugulent les amorces de virgule avec efficacité. Mais les différents modes ne m’ont pas semblé donner une grande différence de comportement général, notamment en suspension. Seul le bloc change un peu sa réactivité. C’est le cas du mode Eco, limitant le couple et affichant une barre verte symbolisant l’impact de votre conduite sur la consommation. Une fonction « scrupule » sans guère d’intérêt.
Offroad
Pour notre escapade hors bitume, nous prenons les commandes d’une R1300 GS Trophy. Dans cette version, la machine parait encore plus légère, dépouillé du superflu. Ses selles plates, alignées et son réservoir incliné laissent beaucoup d’espace pour se mouvoir. Étroite, la machine s’enserre facilement avec les jambes pour un bon contrôle en positions debout. Au menu de la Trophy, bulle courte basculante, clignotants sur la tête de fourche, assises plates, jantes à rayons tangentiels toujours en 19 et 17 pouces et pneus Metzeler Karoo 4. Nous sommes parés.
Le départ sur bitume nous rappelle la polyvalence de ces gommes et leur appréciable grip à très bonne allure. Après une section de piste en terre dur, nous arpentons enfin des sections plus meubles, composée de pierrailles inégales. De quoi constater la facilité de guidage du train avant et, à nouveau, une plus grande rigidité dans la liaison guidon/direction. Sans être flagrant lors de l’essai, il y a certes quelque chose… une sensation différente.
Un passage lent, étroit, permet de jauger du guidage précis et facile ainsi que de l’équilibre, forcément sans défaut, de la GS. Un peu plus ouverte, la géométrie apporte un surcroit de stabilité toujours appréciable en offroad. Debout sur son échine, l’Allemande se pilote aux repose-pieds et aux gants avec aisance, même à très faible allure. Sur notre tracé sec, les Karoo délivrent une bonne motricité et dynamisent les évolutions de la GS. Comme sur route, l’électronique aide largement à canaliser les hautes performances du flat. En mode Enduro ou Enduro Pro, le cerveau central conserve toujours un peu d’anti-patinage. Histoire de ne pas désarçonner les novices ou autres prétentieux sur des coups de gaz malheureux. Mais les meilleurs pourront bien sûr ajuster tout cela facilement et rapidement par le bouton « burger ».
Plus loin, une section parfois cassante rappelle que le Telelever à ses spécificités, d’autres diront défauts ou limites. Ça tape, tabasse sur les gros chocs et le ressenti, pour les plus capés, ne sera peut-être pas celui recherché. Également, si le cardan se fait oublier la plupart du temps, on entend parfois la transmission acatène subir un peu le traitement tout-terrain. Un ultime passage en lit de rivière à sec et un peu plus épais en caillasses diverses et variées donne toutefois un autre aperçu de la GS. Moins transparent sans doute qu’une fourche conventionnelle, son train avant file droit, sans effort, traçant son sillage dans l’agrégat de roches meubles. Mais, finement réactive, la direction permet alors de réajuster la trajectoire en étant moins perturbée par les variations impromptues du terrain. Peut-être un plus, à nouveau, pour les moins expérimentés.
Partie-cycle
Hors pair sur ce point, la BMW R1300 GS optimise encore sa rigidité et sa tenue de route. L’amortissement piloté est très convaincant, mais, sur route comme en dehors, la fourche absorbe toujours les plus gros chocs avec moins de progressivité. L’absence de réglage direct en précharge pourra aussi décevoir, la moto s’ajustant désormais d’elle-même. Efficaces, les suspensions assurent globalement un excellent confort doublé de celui des assises.
Freinage
Puissants, les étriers avant Brembo délivrent une attaque remarquablement modulable. Leur maitrise apporte un excellent ressenti des décélérations, même sur les plus fortes. Un peu trop vive, la morsure de la pince arrière se fait moins progressive, mais laisse toute latitude à son pilote pour corriger ses trajectoires.
Confort/Duo
La BMW R1300 GS ménage une position idéale au pilote. Le passager est remarquablement assis également et sa protection aux flux d’air est très correct. Quelle que soit la qualité du bitume, le confort reste des meilleurs, sauf sur les chocs plus secs. La GS manque alors un peu de capacité d’amortissement hydraulique dans ses compressions hautes vitesses.
Consommation
Avec une moyenne vérifiée de 5,6 L au 100 sur notre essai dynamique de 365 km, la BMW R1300 GS démontre une excellente maîtrise de sa consommation. Un rythme plus tranquille fera largement baisser cette valeur.
Conclusion
Le millésime 2023 de la BMW R1300 GS fera date. Tout d’abord par son esthétique renouvelée, affinée et élégante. Ensuite par son flat twin toujours plus performant et désormais plus compact. Mais aussi par sa personnalité légèrement moins ronde, moins entière qu’auparavant. Pour autant, le trail ne manque aucunement d’explosivité, même si elle devient un peu plus froide. Mais ses qualités essentielles sont toujours au mieux. Équilibre hors norme, partie-cycle hyper-efficace et polyvalence restent ses atouts maîtres. De quoi sans doute justifier une hausse de 700 €, notamment avec des équipements de série supplémentaires. Il faut désormais compter 20 690 € pour la stricte version de base. Le jeu des options vous emmènera vite à près de 27.000 € voire plus.
Des tarifs comparables à ceux de sa principale concurrente, la performante et séductrice Ducati Multistrada V4. Puissante, équilibrée et confortable, l’Italienne est redoutable. Ses différentes versions la place de 24 490 € à 27 790 € en version Grand Tour (et même 37.790 euros pour la version RS). On citera aussi la KTM 1290 Super Adventure, en modèle S dès 20 665 € et R à 21 199 €. Là aussi l’addition peut s’alourdir, mais, de base, les Autrichiennes embarquent nettement plus d’équipements… et leur efficacité globale est remarquable.
Sur son piédestal, la BM R1300 GS fait encore progresser son homogénéité, son ergonomie de pilotage et sa polyvalence. Une crise de la quarantaine qui cependant ne devrait pas créer de rupture avec ses adorateurs. Et sera peut-être même propice à raviver leur flamme.
Points forts
Moteur
Partie cycle
Freinage
Comportement dynamique
Agilité et efficacité
Assistances électroniques
Finition
Points faibles
Position assise
Shifter
Réglage suspensions peu didactique
Béquille centrale optionnelle
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